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Dans une tribune internationale, 379 chercheurs et activistes dénoncent les politiques migratoires de la Tunisie

Un groupe de 379 militants, activistes et chercheurs de plusieurs nationalités ont exprimé leur opposition au Mémorandum d’entente signé entre la Tunisie et l’Union européenne (UE) et dénonce leurs politiques migratoires.

Dans une tribune rendue publique à la date du 15 août 2023, les signataires ont qualifié ces politiques migratoires d’externalisation des frontières de l’UE. Ils ont, également, critiqué les déclarations et interventions publiques du président de la République, Kaïs Saïed, mais aussi celles du ministre de l’Intérieur, Kamel Feki, du ministre des Affaires étrangères, Nabil Ammar et de plusieurs membres de l’Assemblée des représentants du peuple.

« Nous dénonçons un tournant dangereux dans l’acceptation de ces politiques et des présupposés racistes qui les sous-tendent. La Tunisie affiche désormais une volonté propre de maintenir un système d’exclusion et d’exploitation des ressortissant.e.s de pays d’Afrique subsaharienne.

Au lieu de dénoncer cette escalade raciste, fondée sur un discours populiste et conspirationniste, dans un contexte de dérive autoritaire, les responsables européens instrumentalisent l’immigration dite irrégulière en la présentant comme un fléau commun. De manière opportuniste et irresponsable, l’UE consolide le discours présidentiel et alimente la phobie anti-migrant·e·s et anti-noir·e·s, tout en véhiculant l’idée que l’UE aide la Tunisie à protéger ses frontières, et non les frontières européennes », ont-ils écrit.

Les signataires de la tribune ont exprimé leur solidarité avec les migrants et leur rejet des discours de haine de part et d’autre de la Méditerranée. Ils ont critiqué l’attitude de certains individus se présentant comme des universitaires et présentant des arguments non fondés. Ils ont indiqué que les populations vulnérables étaient utilisées comme boucs-émissaires dans le but de dissimuler l’échec des politiques publiques en Tunisie.

Les signataires de la tribune sont revenus sur les déclarations du président de la République, Kaïs Saïed, ayant conduit à des attaques violentes ciblant les migrants subsahariens. Ces attaques se sont intensifiées suite au meurtre d’un Béninois suivi du meurtre d’un Tunisien à Sfax commis par un ressortissant subsaharien. 1.200 ressortissants ont été déportés aux frontières tuniso-libyennes et tuniso-algériennes suite à des rafles organisées à Sfax. Les migrants y ont été abandonnés sans eau, sans nourriture et après avoir été agressés. Selon la tribune, vingt morts ont été signalés.

« Nombre de ces personnes n’arrive pas à se régulariser du fait d’un cadre législatif obsolète et incohérent, et de procédures administratives lentes et complexes. De la même façon que pour les ressortissant.e.s tunisien·ne·s en Europe, leur migration est rendue irrégulière par des lois et pratiques qui classifient les populations du continent Africain en migrant·e·s « désirables » et « indésirables » et qui criminalisent une grande partie de sa jeunesse. À l’opposé, le séjour irrégulier des migrant·e·s occidentaux – assez répandu en Tunisie due aux mêmes dysfonctionnements – n’est pas vu comme un problème sécuritaire.

De surcroît, rien ne permet d’affirmer que les travailleur·euse·s migrant·e·s sont responsables de la dégradation de l’économie tunisienne, tel que le suggèrent les discours xénophobes. A l’instar de nombreux tunisien·ne·s, ils et elles sont en réalité exploité·e·s, exposé·e·s à la précarité et à la vulnérabilité alimentaire. La crise économique actuelle trouve plutôt sa source dans le manque de perspectives économiques, les politiques d’austérité soutenues à l’international, la gestion de la dette publique, ou encore l’incapacité de l’État à remédier aux inégalités socio-économiques », a expliqué la tribune.

La même source a assuré que le Mémorandum signé entre l’UE et la Tunisie ne protégeait pas la souveraineté de notre pays. Les signataires ont évoqué l’appui financier pour la gestion des frontières et ont estimé qu’il s’agissait d’une forme d’application des politiques européennes. La mise en place d’un système d’identification et de retour des migrants irréguliers déjà présents en Tunisie vers leurs pays d’origine, selon eux, suggérerait le développement de l’approche « hotspot ». Ceci signifie que la Tunisie sera chargée de gérer les frontières extérieures de l’UE. Le pays aura l’obligation de bloquer l’accès vers l’UE et les migrants se retrouveront, donc, confinés en Tunisie.

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